Introduction
De nos jours le mot voyage s’est enrichi de nouvelles acceptions puisqu’on commence déjà à faire des réservations pour des voyages dans l’espace et que les scientifiques discutent la possibilité d’un voyage dans le temps. En attendant que diriez-vous de vous mettre à l’avant-garde? En fait nous vous proposons un voyage dans le passé, dans les années 1720 et dans un pays pas très lointain, un voyage en France. Il s’agit du voyage de Yirmisekiz Çelebi Mehmet Efendi, ambassadeur extraordinaire du sultan ottoman Ahmed III, auprès de Louis XV. La Relation de voyage de l’ambassadeur, hôte de marque de l’Etat, qui aura ses entrées auprès des grands du royaume, des hommes de science et des artistes et dont le titre lui ouvrira les portes de nombreuses institutions visitées dans des conditions privilégiées, peut être considérée comme un rapport officiel et public. Cet article1 en se basant sur la Relation citée va essayer de souligner les différences culturelles et sociales qui existaient à l’époque entre l’Orient (l’Empire ottoman) et l’Occident (la France) et de mettre en relief les observations de son auteur qui annonceront l’ouverture vers l’Occident de l’Empire ottoman.
Avant de vous présenter notre auteur et son oeuvre dont la valeur littéraire a été appréciée par les spécialistes, et d’essayer de relever dans cette Relation les répercussions de ce nouveau monde ainsi que ses apports à l’Empire ottoman, un aperçu général de la situation socioculturelle et politique de l’époque -tout en restant dans la géographie ottomane- nous semble indispensable.
Aperçu sociopolitique
L’Empire ottoman fut jusqu’à la fin du XVIIe siècle une entité hermétiquement fermée sur ses valeurs culturelles, sociales et religieuses et fut tout à fait en contraste avec le monde occidental notamment au niveau des mœurs. Le sultan, chef temporel et spirituel de l’Empire, était un souverain absolu et les habitants de son empire étaient ses sujets sur lesquels il avait droit de vie et de mort. Il gouvernait personnellement ou par l’intermédiaire du grand vizir qui dirigeait son conseil, le Divan, et des ministres nommés vizirs, révocables à tout moment. Il était à l’origine un chef de guerre choisi parmi les descendants de l’ancêtre Osman. Mais progressivement son pouvoir s’est enrichi de prestiges nouveaux : la prise de Constantinople le changea en empereur, la victoire sur l’Egypte et l’achat des droits du Khalifat firent de lui le khalife, successeur de Mahomet et le représentant de Dieu sur terre, le chef de la communauté musulmane sunnite. L’autorité du sultan s’appuyait sur une élite politico
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militaire, recrutée principalement parmi des chrétiens de naissance convertis de force à l’islam, notamment de jeunes garçons grecs, albanais ou slaves enrôlés dans le cadre du «ramassage» (devchirmé), puis soigneusement éduqués dans les palais impériaux. Ce même système de «ramassage» était aussi valable pour les janissaires, le fer de lance de l’armée ottomane. Le XVIe siècle fut une époque où l’ordre et la sécurité régnèrent dans l’Empire ottoman grâce à la cohérence existant entre le sultan, son armée et le corps juridico-religieux des ulémas, ce qui favorisa le commerce et l’activité économique. L’Empire offrait ainsi un tableau de grande prospérité et les Occidentaux, marchands et consuls étaient de plus en plus nombreux à s’y rendre. Mais dès les XVIIe et XVIIIe siècles cette cohérence politique et militaire laissa sa place à la corruption, aux défaites et notamment les janissaires, gardiens de l’Empire jusqu’alors, se transformèrent en un outil politique entre les mains des vizirs et devinrent une force redoutable capable de détrôner le sultan. D’autre part les sultans ne semblaient plus intéressés par les innovations technologiques militaires de l’Occident, la flotte ottomane ignorait le développement de la marine à voile, tandis que les soldats et officiers turcs affrontés à de nouveau corps, de nouveaux armements, de nouvelles tactiques étaient conscients de ce recul évident. Les revers militaires face aux Occidentaux aboutirent à des traités désastreux tout en mettant en évidence le déclin de l’Empire ottoman et en persuadant les autorités que la supériorité était passée aux Occidentaux et qu’il fallait en tirer des leçons. Aussi la science ottomane se sclérosa-t-elle, tournant le dos aux révolutions de la Renaissance. Les découvertes géographiques européennes, telle que la route du Cap, permirent aux navigateurs occidentaux de court-circuiter le MoyenOrient musulman sans être obligé de passer par les territoires des ottomans, ce qui remit en cause son rôle commercial traditionnel entre l’Orient et l’Occident. En fait au seuil du XVIIIè siècle c’est la situation que nous venons de décrire qui provoque la remise en question de la supériorité des valeurs sociopolitiques et économiques de l’Empire ottoman. Mais malgré cette décadence visible l’Empire restera toujours le centre d’intérêt du voyageur occidental attiré par cette société orientale d’aspect pittoresque. En 1718 le sultan Ahmed III confie le poste de grand vizir à son gendre Damat Ibrahim pacha et ce dernier arrive à conclure la paix de Passarowitz, acceptant de céder d’importants territoires au profit de la maison d’Autriche. Ainsi après la paix de Carlowitz pour la seconde fois en dix-neuf ans l’Empire se trouve confronté à de graves reculs et à la nécessité de renforcer les relations de la Sublime Porte avec les Etats chrétiens : ainsi, renouer en premier lieu avec les alliés, spécialement avec la France, devient obligatoire. Cependant comme le souligne Kazancıgil avec l’avènement du vizir une période d’élan et de développement se concrétisera notamment par le biais de quatre événements, entre autres, la fondation d’un comité de traduction, l’ambassade en France de Yirmisekiz Çelebi Mehmet Efendi, la création de la première imprimerie à caractères arabes, et les semailles des premiers grains dans le domaine militaire dont la récolte ne sera cueillie que dans les années futures (Kazancıgil, 1999 : 198-210).
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La période du règne d’Ahmed III est baptisée dans l’histoire ottomane d’«Ere des Tulipes» car le sultan, bien que « mélancolique, sujet à des crises d’épilepsie » était aussi un grand coureur de jupons, un amateur d’oiseaux, de tulipes, d’œillets, de miroirs et de feux d’artifice et par conséquent la cour stambouliote se trouvait vouée à ces penchants raffinés et quelques peu frivoles. Et le grand vizir, afin de conserver son poste – le sultan dans les quatorze premières années de son règne avait changé douze fois de grand vizir – cherchait à divertir le sultan par des fêtes inouïes, des séduisantes nouveautés (Veinstein, 1981 : 21). C’est peut-être de cette recherche de la nouveauté que naquit l’idée d’une ambassade en France. En fait, lors d’un entretien, le grand vizir Ibrahim pacha annonça au marquis de Bonnac, ambassadeur de France à la Porte, le projet d’envoyer une ambassade en France. Mais ce dernier n’y croyant pas, jugea inutile d’en informer le Duc d’Orléans, régent de France pendant la minorité de Louis XV. En fait établir des ambassades à l’étranger était considéré comme une indignité par la Porte qui se contentait d’envoyer des émissaires temporaires sans le titre d’ambassadeur. Le privilège d’envoyer des ambassadeurs jusqu’ici avait seulement été accordé à l’empereur autrichien. C’est pourquoi Bonnac, une fois convaincu que l’ambassade aurait lieu, par précaution et aussi par souci de prestige, insista sur le choix d’un personnage remarquable en soulignant notamment la différence des mœurs et des coutumes entre les deux pays. Le 10 août 1720, Yirmisekiz Çelebi Mehmet Efendi fut désigné, il arriva en France en 1720 et y resta jusqu’à 1721.
Profil de Yirmisekiz Çelebi Mehmet Efendi
Agé d’une cinquantaine d’années au moment de son ambassade, Mehmet Efendi avait été élevé dans la maison impériale, après quoi il avait rejoint le corps des janissaires et était affecté à la 28e compagnie, d’où son sobriquet de Yirmisekiz : le 28. Il y devint inspecteur de l’Arsenal. Avant de poursuivre l’itinéraire de l’ambassade et de nous promener dans les allées de l’histoire, essayons d’abord de présenter cet homme par ses quelques lignes écrites au grand vizir lors de son voyage :
« Les Francs, écrit Mehmet Efendi, ne ressemblent pas plus aux Turcs que la nuit ne ressemble au jour. Quand nous entrons dans un appartement, nous ôtons nos chaussures et demeurons la tête couverte. Les Francs gardent leurs souliers et enlèvent leur chapeau. Nous laissons croître notre barbe et rasons nos cheveux. Ils laissent croître leurs cheveux et rasent leur barbe. Nous écrivons de droite à gauche, ils écrivent de gauche à droite. Nous mettons des tapis sous les tables. Ils en mettent dessus. Chez nous les morts vont vite et les vivants lentement. Chez eux, les vivants vont vite et les morts lentement. Chez nous les femmes portent des pantalons et les hommes des robes. Chez eux les hommes portent des pantalons et les femmes des robes. Bien plus, dans les cérémonies, chez nous les femmes passent derrière; chez eux, elles passent devant. Bref, mettez un Turc la tête en bas et les pieds en l’air, vous aurez un Franc »2 (Gentizon, 1929 : 128).
Cette approche humoristique mêlée de curiosité est le signe d’une personnalité intéressante dont la valeur sera également appréciée par ses hôtes français et notamment françaises. On constate tout au long de son récit que ce personnage
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si éclairé n’est point gêné de cette culture bien différente de la sienne et cela même quand les mœurs s’opposent à la tradition islamique. Par contre il cherche à relever ces différences en y ajoutant son point de vue qui exprime une grande admiration.
Notons aussi que le sultan le présenta dans ses lettres de créance comme un administrateur militaire spécialisé dans les questions financières et techniques et aussi comme un fin lettré, composant des vers sous le nom de Faizî (Veinstein, 1981:32). Nous pouvons ajouter que l’intérêt de cet intellectuel à la culture n’est pas limité à la littérature puisque lors de notre recherche nous avons eu la chance de trouver des documents3 concernant une traduction qu’il avait faite et qui ne fut découverte que dans les années 80. Il s’agit d’un livre de physique intitulé Şecere-i İlahiyye rédigé par Şehrezûrî, philosophe iranien ayant vécu au XIIIè siècle, et dont le quatrième chapitre, « Semeretü’ş Şecere » (Le fruit de l’arbre) qui donne des informations détaillées sur la physique fut traduit par Mehmet Efendi. Dans l’avant-propos de sa traduction, Mehmet Efendi souligne que c’est après avoir constaté l’insuffisance des livres utilisés par les élèves qu’il s’est mis au travail. Nous pouvons dire par conséquent, que toutes ces choses qu’il rencontre en France ne sont pas entièrement nouvelles pour lui et même si c’est la première fois qu’il a l’occasion de les voir de ses propres yeux, il en a du moins des notions préexistantes. Aussi ne doit-on pas être surpris de constater lors de son voyage combien il est attiré par les « curiosités » scientifiques qu’il décrit dans tous les détails avec une précision surprenante. Et enfın finissons le portrait que nous venons de peindre en y ajoutant une dernière teinte, celle de son côté politique. En fait Mehmet Efendi est également un homme politique puisqu’il a participé aux négociations de Passarowitz comme trésorier de troisième ordre où il a eu, d’après l’ambassadeur de France (Bonnac), beaucoup de succès auprès des ministres des princes chrétiens.
Itinéraire de l’ambassade
On peut distinguer deux objectifs dans ce projet d’ambassade : d’une part sous le prétexte de la réparation de l’église de Saint-Sépulcre à Jérusalem, réclamée depuis longtemps par le roi de France, « affermir l’étroite et ancienne amitié des deux empires » (Veinstein, 1981: 26) - ce sera le thème des lettres officielles apportées par Mehmet Efendi - et d’autre part, « faire une étude approfondie des moyens de civilisation et d’éducation et faire un rapport sur ceux capables d’être appliqués » (Veinstein, 1981: 28) dans l’Empire ottoman. C’est aussi l’occasion de venir féliciter le roi Louis XV pour son avènement.
Du côté français, l’arrivée de l’ambassade ne tombait pas du tout au moment opportun. En fait la France avait des difficultés financières, et une telle ambassade entraînerait de grandes dépenses pour le Trésor. De plus, s’étant rapprochée des Habsbourg, elle n’en tirerait aucun avantage diplomatique. D’autre part une terrible épidémie de peste ravageait le Midi et par conséquent l’ambassadeur serait obligé de subir des quarantaines et de faire un détour par l’ouest de la France. Les ambassadeurs des pays d’Orient contrairement à ceux de l’Europe, jouissaient du privilège d’être défrayés pendant tout leur séjour aux dépens du roi et de recevoir des honneurs extraordinaires dans les
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villes de leurs passages. Malgré tous ces inconvénients, le gouvernement du Régent, prévoyant les intérêts religieux et commerciaux de la France en Orient, tâchera d’accomplir avec le plus grand succès possible cette ambassade. Peutêtre jugea-t-on que ce serait un spectacle exceptionnel pour distraire le peuple des duretés de l’époque (Veinstein, 1981 : 30). Cette Relation rédigée sur la commande du grand vizir, à la manière à la fois d’une chronique et d’un rapport semi-officiel, englobe tout le voyage et est également écrite conformément aux ouvrages historiques ottomans où même la moindre mesure des distances n’est pas oubliée : « Je commencerai dès aujourd’hui s’il plait au Dieu Tout-Puissant, à mettre par écrit jour par jour tout ce qui m’arrivera et à décrire les endroits par où je passerai et les lieux que je verrai » (Mehmet Efendi, 1981: 59), dit-il dès son départ le 7 octobre 1720 sur un vaisseau marchand français procuré par le marquis de Bonnac. Mehmet Efendi est accompagné de son fils Said Efendi et d’une nombreuse escorte comprenant plus de quatre-vingts personnes. Après quarante-cinq jours de traversée, ils arrivent à Toulon où ils seront contraints de subir la quarantaine due à l’épidémie de peste qui dévastait Marseille. Ils devront par conséquent renoncer au projet de se rendre à Paris par terre et accepter de faire le trajet sur les petits bâtiments de rivière sur lesquels on prépara même une chambre dorée pour l’ambassadeur. Ils traversèrent plusieurs villes et villages situés aux alentours de la Garonne, de la Loire, de la Seine, à savoir Toulon, Bordeaux, Poitiers, Orléans, où on leur fit les plus grands honneurs. L’ambassadeur nous les transmet dans sa Relation avec le plus de détails possibles : « Dans toutes les villes et forteresses où je passais, on envoyait toujours une troupe de soldats une lieue au-devant de moi. Lorsque j’étais arrivé à la ville, ils me conduisaient en pompe à mon logis, où les grands du pays, de même que les consuls, venaient me féliciter sur mon heureuse arrivée et me portaient des fruits et des confitures. Il y avait toujours sur mon chemin une si grande foule d’hommes et de femmes qu’il semblait que dans la ville où j’arrivais il n’y avait de monde que par les endroits où je passais. (…) Il y avait toujours quelques personnes qui, presque étouffées par la presse, se mettaient à faire de hauts cris et je voyais même venir devant moi des femmes évanouies» (Mehmet Efendi, 1981: 85). Nous allons essayer, tout en suivant l’ordre de l’itinéraire de la Relation, de nous attarder sur les descriptions de divers lieux et objets qui offrent de l’intérêt pour l’auteur et qu’il estime être des modèles susceptibles d’une application à la société ottomane. Ce trajet, obligatoire à cause de l’épidémie, lui fournit l’occasion de découvrir le canal du Languedoc ou canal du Midi, l’un des plus importants monuments du règne de Louis XIV avec au total 100 écluses, 38 ponts et 4 ponts-aqueducs. C’est avec minutie qu’il décrira ce monument qui d’après lui « mérite d’être mis au nombre des merveilles du monde » (Mehmet Efendi, 1981:76) et il expliquera également ses apports commerciaux et économiques. Mais cependant, comme le souligne Yerasimos, « même sa description détaillée du seul ouvrage d’art strictement utilitaire qui retient son attention, le canal du Midi, ne servira que comme modèle pour la réalisation d’un bassin devant le pavillon de plaisance du sultan » (Yerasimos, 1999: 71).
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La relation de voyage de Yirmisekiz Çelebi Mehmet Efendi et son impact Après un long et pénible voyage c’est également avec la même curiosité et la même pompe qu’il sera reçu à Paris où il fera son entrée au mois de mars 1721. Le voyage d’Istanbul à Paris avait duré environ cinq mois. Les grandes rues de Paris seront tellement peuplées par les soldats et par la foule que c’est avec une grande difficulté que l’escorte pourra avancer. Ces quelques lignes teintées de l’esprit humoristique de l’auteur suffisent à montrer son contentement. « Elles [les fenêtres] étaient toutes chargées d’hommes, de femmes et de petits enfants, car, comme on n’avait point vu de Turcs, grands et petits, voulaient savoir quelle sorte d’hommes nous étions. Le roi même, le duc d’Orléans, son oncle et son tuteur, tous les gens de la cour et tous les grands seigneurs avaient pris chacun une maison pour voir mon entrée » (Mehmet Efendi, 1981: 93).
On constate qu’il ne s’agit pas d’une exagération de l’auteur puisque nous trouvons presque la même description dans les extraits du journal de Matthieu Marais4, avocat au Parlement de Paris. En voici quelques fragments :
« Tout Paris le va voir dans une maison du faubourg Saint-Antoine, où il est en attendant son entrée. (…) Le roi était chez Mme la maréchale de Bouffler, à la place Royale, pour voir passer cette entrée, où tout Paris a accouru. (...) L’ambassadeur turc a eu son audience du roi. Il est venu avec le même cortège qu’à son entrée (...) Toute la maison du roi était à cheval. (...) Il a paru d’un air libre, gracieux, et comme si le Louvre était sa maison. Les dames étaient dans la galerie, sur des gradins, très parées » (Marais, 1863 : 101-102, 104-105, 108-109, 118).
L’intérêt qu’il suscite ne sera pas limité par le peuple simplement, le roi Louis XV, âgé alors de onze ans, sera également très attiré par ce personnage bien différent de ceux qui l’entourent. Et à part les audiences officielles et les visites, des parties de chasse, des promenades seront arrangées pour que le roi puisse contempler cet ambassadeur tellement intéressant soit par ses manières, soit par son allure.
Mehmet Efendi et sa suite menèrent en France une vie parfaitement musulmane faisant leurs prières cinq fois par jour, mangeant généralement à la turque. Ces repas bien différents des usages occidentaux présentaient pour les Français un spectacle à ne pas rater et ils en profitaient lorsque l’occasion se présentait. Ici il faudrait encore souligner ce contraste visible entre les deux civilisations. Les Français avaient déjà consacré l’importance de l’étiquette et du bien-manger grâce à Louis XIV, ce monarque gourmet, à qui on doit le service à la française avec un décorum prodigieux. Aussi la table orientale leur offrait un tableau bien bizarre. En fait la table était dressée sans en utiliser nappe, serviette, couteau, fourchette ou assiette : rien sinon une cuillère de corne ou d’ivoire, sur un grand bassin plat de cuivre, soutenu par un pied de fer de deux pouces de hauteur où l’ambassadeur était servi, par une vingtaine de valets, de quarante à cinquante plats différents sans compter les salades. Pour essuyer ses doigts il utilisait soit son pain, soit les bouts des toiles colorées que les domestiques tenaient autour de leur corps. La coutume d’assister aux repas simplement pour le voir manger le gêna fort, mais il y accepta par respect à cette tradition5. Les usages orientaux n’empêchaient pas cependant l’ambassadeur et son fils
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de profiter de la vie mondaine occidentale. Leur savoir-vivre, leur intelligence, leur finesse et leur galanterie émerveillaient la cour et notamment les femmes qui se souciaient peu des rumeurs. En fait la duchesse d’Orléans, mère du régent se plaint de cette situation dans une de ses lettres à M. de Harling6:
« (...) Trois femmes de qualité ont fait des choses vraiment affreuses : elles ont suivi à Paris l’ambassadeur turc, elles ont attiré à elles son fils, l’ont bel et bien enivré, et ont passé deux jours avec ce drôle à grande barbe dans le labyrinthe. (...) cela fera une belle réputation à Constantinople aux chrétiens et aux dames de qualité. Le jeune Turc a dit à Mme de Polignac, une de ces trois dames (il a parfaitement appris le français) : “Madame, votre réputation était venue jusqu’à Constantinople, et je vois bien, madame, qu’on nous a dit la vérité» (Duchesse d’Orléans, 1863 : 270-271).
Dans sa Relation de voyage, nous constatons qu’à part les détails protocolaires – signe de l’importance qu’il prête à son maître le Sultan – Mehmet Efendi s’applique minutieusement à décrire les instruments qui constituent la base matérielle du développement des sciences. Toute sorte de nouveauté, ce qui est pleinement dans l’esprit de sa mission, l’attire. Il visitera la Bibliothèque du roi, qui l’étonnera par la richesse, et où il admirera le grand nombre de manuscrits turcs et arabes et une multitude d’ouvrages imprimés, les Jardins du Roi, l’Observatoire, l’Opéra, l’Académie royale des sciences qui renferment un amas prodigieux de « curiosités », sur toutes les parties de la physique, des mathématiques et de l’histoire naturelle. Ces observations lui fourniront un immense matériel pour sa Relation. Toutefois il ne fait guère de place aux théories, et se contente d’une approche toujours concrète : nous constatons que son attrait pour la science est basé sur son goût pour les expériences spectaculaires. Il évoque avec un grand enthousiasme et une claire compréhension le mécanisme des réalisations scientifiques et techniques. Lors de sa visite du palais et du jardin de Marly il sera émerveillé par la fameuse «machine de Marly» qui élevant l’eau de la Seine à l’aide d’un aqueduc la fait parvenir à Versailles. « … pour moi je n’ai jamais entendu parler de rien qui approchât de ce miracle de l’art » (Mehmet Efendi, 1981:128) écrira-t-il. De même, c’est avec le même intérêt et une stricte précision qu’il évoquera l’atelier de polissage des miroirs et l’atelier de tapisserie. Sa visite au Jardin du Roi, l’actuel Musée d’Histoire naturelle, lui fournira l’occasion d’observer toutes sortes d’oiseaux, de bêtes et de plantes «inconnues en Turquie» ou encore les animaux du Nouveau Monde qu’il découvrira dans la ménagerie de Chantilly. Il donnera aussi des informations sur les serres bâties pour les plantes exotiques, en soulignant sa surprise de voir à quel point on avait développé les soins pour parvenir aux objectifs visés. Mais ce qui va l’attirer le plus, ce sera l’Observatoire, où il ne se contentera pas d’une seule visite et auquel il réservera plusieurs pages dans la Relation. Les descriptions des machines et ses allusions, nous montrent bien qu’il était au courant de toutes les nouveautés et qu’il était notamment très intéressé par les sciences. Il présente les moindres détails bien qu’il sache que le coût énorme de ces ouvrages empêcherait leur réalisation dans son pays, qu’on n’ajouterait aucune foi à son rapport et qu’on ne croirait jamais une chose aussi extraordinaire.
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Ce lettré oriental est également attiré par les arts et les divertissements de l’esthétique classique du goût louis-quatorzien parmi lesquels on peut citer l’opéra, les spectacles, les instruments de musique, les bâtiments, le mobilier, les bibelots et surtout les jardins. L’opéra, « un divertissement particulier », sera décrit dans la Relation dans tous ses détails avec la salle, la scène, les décors, les musiciens, les acteurs, le sujet de la représentation et même la splendeur des spectatrices (Mehmet Efendi, 1981: 115-119). Quant aux jardins, on constate qu’il y porte un intérêt particulier et essaie de ne pas manquer le moindre détail, ne serait-ce que pour faire plaisir au grand vizir qui ne pensait qu’à divertir le sultan par des nouveautés. C’est pourquoi nous avons dans la Relation les descriptions de tous les jardins où il fut invité, entre autres Versailles, Trianon, le château Meudon, le château Marly et il sera également fasciné par la multitude de fontaines qui garnissent ces parcs.
Cependant il faut préciser que la cour stambouliote et la cour parisienne partageaient le même goût pour les tulipes, les pierres précieuses, les brocarts d’or et d’argent, les oiseaux rares, les jeux de lumière en plein air, etc. Pourtant Mehmet Efendi se trouve parfois en pleine difficulté d’expression devant toutes ces choses dont une grande partie est tout à fait nouvelle pour lui. Il se croit incapable de les décrire et pense qu’il faudrait les avoir vues pour en croire à sa description.
A côté des descriptions pittoresques qui englobent son séjour à Paris et tout son trajet, aller, et retour, on peut dire que l’auteur, dans sa Relation, prête une grande importance aux détails protocolaires et cérémoniels tandis qu’il ne fournit aucune appréciation politique concrète sur la situation intérieure et extérieure du royaume, et aucune information sur ses négociations concernant par exemple, le problème de la piraterie maltaise qu’il avait la mission de présenter aux autorités françaises. Cela fait penser que les questions politiques furent peut-être traitées à part dans une autre relation qui n’aurait pas été offerte au public. On constate également que les mœurs des Français ne sont pas abordées dans la Relation, à l’exception de la situation des femmes qui est tout à fait en opposition avec celle du monde oriental. Mehmet Efendi est en fait très surpris de la liberté des femmes qu’il rencontre partout et du respect que les hommes témoignent pour elles. « En France, les hommes ont beaucoup de respect pour le sexe : les plus grands seigneurs feront des honnêtetés incroyables aux femmes du plus bas état, de sorte que les femmes font ce qu’elles veulent et vont en tel lieu qu’il leur plaît» (Mehmet Efendi, 1981: 73-74). Sa surprise ne doit pas par contre nous surprendre quand on connaît la situation de la femme ottomane. Cette image de femme enfermée dans le harem, l’institution islamique où régnait une véritable discipline sous la houlette de la reine-mère et du chef des eunuques, était bien sûr en catégorique opposition avec la femme française. Le harem était strictement interdit aux hommes à l’exception du sultan. Cette institution faisait partie des mœurs musulmanes et régnait dans toutes les couches sociales. De même la femme qui faisait partie de la haute société vivait également enfermée dans son konak et ne jouissait d’aucune liberté ne pouvant sortir de sa demeure sans la permission de son mari, sans être accompagnée et sans porter le voile. Cette situation s’accentuera au XIXe siècle de sorte que la femme en dehors de sa
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maison sera obligée à porter le tcharchaf, sorte de vêtement qui l’enveloppait du pied à la tête.
Ce récit de voyage qui commence à être rédigé le 7 octobre 1720 dès le départ d’Istanbul finira avec le retour à Istanbul le 8 octobre 1721. On peut affirmer que cette ambassade que chacun des deux gouvernements avait voulu exceptionnelle le fut en effet grâce à l’opposition des mœurs que le défilé de son entourage exposait mais encore à la personnalité attirante de l’ambassadeur lui-même. Nous devons y ajouter ce passage tiré du mensuel parisien Le Nouveau Mercure7 publié au mois d’août, date qui correspond au départ de Paris de l’ambassadeur et qui nous montre bien que ce dernier assuma sa charge avec succès : « Ce ministre oriental a fait briller dans toutes ses démarches et tous ses discours un goût européen. Il a visité tous les lieux que cherche la curiosité éclairée ; il a parcouru les cabinets rares et feuilleté les bibliothèques choisies ». Contrairement à l’usage qui voulait que les ambassadeurs au retour de leur mission soient exilés ou nommés gouverneurs à des provinces très éloignées, Mehmed Efendi fut reçu avec enthousiasme « Tout ce qu’il nous apprend nous remplit d’admiration », déclara Ibrahim pacha (Veinstein, 1981 : 48). Mehmed Efendi, promu intendant des finances, fut le grand initiateur des « modes franques » et ne cessa de proposer au grand vizir diverses choses dans le goût de celles qu’il avait vues en France. Impact du voyage La Relation fut présentée dans un très court délai au grand vizir. Nous devons souligner que son apport au mouvement de l’Occidentalisation est indiscutable car il entrouvre pour la première fois une porte serrée à double clé, mais ce ne sera qu’à partir du XIXè siècle, sous le règne du sultan Mahmud II, plus de quatre-vingts ans après cette ambassade, qu’on pourra faire la récolte des grains semés. Cependant, en dépit du scepticisme des religieux, une idée nouvelle de la France et de l’Europe commença à se répandre dans la société ottomane. La plus importante des innovations consécutives à l’ambassade fut la création de la première imprimerie à caractères arabes. Cette grande invention du XVè siècle avait été établie dans l’Empire par les immigrés juifs dès la fin du XVè siècle. En 1567 une imprimerie arménienne, puis en 1627 une imprimerie grecque furent de même fondées tandis que l’imprimerie en caractères arabes et persans resta proscrite car le corps religieux craignait que les écritures imprimées cessent d’être des écritures saintes. On devait attendre quelques années pour convaincre le grand vizir sur l’utilité de son emploi et pour obtenir l’accord du cheikh ul-islam, grand chef de la religion et grand juge, à condition de renoncer à publier non seulement le Coran mais aussi tout ouvrage à caractère religieux. On doit la réalisation de ce projet en grande partie à Said Efendi, fils de Mehmet Efendi, secrétaire officiel de l’Ambassade, qui avait accompagné son père à Paris, ainsi qu’à un renégat d’origine hongroise, İbrahim Müteferrika. En 1727 l’imprimerie fut officiellement créée par le support des établissements des minoritaires qui leur prêtèrent les caractères et les machines à imprimer en attendant l’importation de France. Parmi les ouvrages dans les domaines historiques, géographiques et linguistiques publiés en ottoman, prit naturellement place La Relation de Mehmed Efendi
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La relation de voyage de Yirmisekiz Çelebi Mehmet Efendi et son impact
Mais dès 1730 on constate de grandes modifications dans les conditions politiques de l’Empire, à savoir l’exécution du grand vizir, la déposition d’Ahmed III, la grande hostilité aux modes franques. Les défaites militaires en Orient, notamment en Perse seront en grande partie à l’origine de ces changements. Par conséquent l’influence française sera nettement réduite et Mehmed Efendi qui fut un intermédiaire culturel entre l’Empire ottoman et la France sera exilé comme gouverneur à Chypre où il meurt en 1732. Quant à l’aventure de l’imprimerie turque à caractères arabes, après avoir imprimé en tout dix-sept ouvrages, elle fermera ses portes en 1742 pour ne les rouvrir qu’en 1784.
Nous avons essayé jusqu’à maintenant de souligner le rôle reconnu de cette Relation et de ce personnage dans le mouvement d’occidentalisation de l’Empire ottoman, l’impact des voyages sur les sociétés à travers les relations. Nous allons finir en abordant brièvement son apport pour les Français de l’époque. Dès le retour de Mehmet Efendi, l’ambassadeur français Bonnac obtint une première version de la Relation, une sorte de résumé, qu’il fit traduire à un jeune Français Julien - Claude Galland, âgé de seize ans et qui n’avait alors que deux ans d’étude du turc. Dans les deux années qui suivirent, Bonnac, après avoir assez longuement négocié avec l’auteur, arrive à se procurer une plus longue version qui fut de nouveau traduite par le jeune Galland mais cette foisci avec plus de maîtrise dans la langue turque. Cette traduction française sera publiée en 1757 et fournira au public français l’occasion d’observer la France de la Régence à travers un œil étranger. La traduction a été republiée en 1981 sous le titre de Le Paradis des infidèles par la Librairie François Maspero avec la préface de Gilles Veinstein à laquelle nous nous sommes référées lors de notre étude. Veinstein nous offre également en annexe des textes d’origine française, à savoir journaux, lettres, mémoires, etc.
Nous pouvons ajouter également que dans le domaine de la littérature, la Relation a servi sans doute de modèle authentique aux Lettres persanes de Montesquieu et à tant d’autres ouvrages. Notons que la rédaction et la publication des Lettres persanes suivent de près la date du voyage de Mehmet Efendi et comme nous avons déjà dit, grâce à ce dernier l’Orient, l’orientalisme, les turqueries redeviennent très à la mode en France. Même les tapisseries des Gobelins furent tissées représentant des scènes de l’ambassade. Nous pouvons aussi voir les retombées dans le domaine de l’enseignement. Cet extrait pris du Journal de la Régence8 rédigé par Jean Buvat, écrivain de la Bibliothèque du roi en est la preuve : «M. le comte de Toulouse résolut de faire instruire un certain nombre de jeunes gens au Collège des Jésuites de Paris, dans les langues turque et arabe, pour servir un jour d’interprètes, au lieu d’en envoyer à Constantinople et dans les échelles du Levant » (Buvat, 1865: 216). Une dernière constatation, en nous basant sur les écrits de l’époque : notons que les Français avaient vu dans ce personnage poli, sage, éclairé et exotique par son allure et ses mœurs pittoresques une nature humaine universelle, idée si chère à la pensée du Siècle des Lumières.
En guise de conclusion nous pouvons dire que ce voyage diplomatique suivi de la Relation a assumé entre autres une triple fonction. D’une part il a ouvert la porte au mouvement d’Occidentalisation de l’Empire ottoman - dans ce
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contexte la Relation a été conçue comme le premier document écrit- dont le plus important apport fut la création de la première imprimerie à caractères arabes. D’autre part il a offert à la France de la Régence la possibilité de se regarder à travers un tableau peint par un étranger; et en dernier lieu il a servi sans doute de modèle aux Lettres persanes de Montesquieu et à tant d’autres ouvrages élaborés sur le même modèle.
Bibliographie Anamur, H., 1997. « Préface » in Hommage à Hasan-Âli Yücel, La Traduction : Carrefour des Cultures et des Temps, İstanbul : Publication de l’Université Technique de Yıldız.
Buvat, J., 1865. Journal de la Régence 1715-1723, Paris : éd. Emile Campardon, II, in Le Paradis des infidèles, pp.209-218.
Duchesse d’Orléans, 1863. Correspondance complète de Madame, duchesse d’Orléans née princesse Palatine, mère du régent, traduction G. Brunet, II, Paris, pp.270-271, in Le Paradis des infidèles, pp. 223-224.
Gentizon, P., 1929. Mustapha Kemal ou l’Orient en marche, Paris : Bossard.
Kazancıgil, A., 1999. Osmanlılarda Bilim ve Teknoloji, İstanbul : Gazeteciler ve Yazarlar Vakfı Yayınları.
Kemal, S., 1989. Mémoire de maîtrise inédite «Şehrezûri’nin el-Şeeceretü’l-İlahiyye isimli Eseri ve Türkçe tercümesi Semertü’ş-Şecere », İstanbul : Université de Marmara.
Marais, M., 1863. Journal et Mémoires, 1715-1735, Paris : éd. Lescure, II, pp. 101-102, 104-105, 108-109, 118, in Le Paradis des infidèles, pp. 221-222.
Mehmet Efendi, 1981. Le Paradis des infidèles, un ambassadeur ottoman en France sous la Régence, Paris : François Maspero, La Découverte.
Veinstein, G., 1981. « Introduction », in Le Paradis des infidèles, un ambassadeur ottoman en France sous la Régence, Paris : François Maspero, La Découverte, pp. 7-51.
Yerasimos, S., 1999. “Explorateurs de la modernité. Les ambassadeurs ottomans en Europe”, in Genèses, Volume 35, Numéro 35, pp. 65-82.
Notes 1 Le présent article est une version révisée de notre communication présentée au colloque Seuils & Traverses III, tenu à l’Université de Versailles Saint-Quentin-en Yvelines, les 10-13 juillet 2002. 2 Paul Gentizon, Mustapha Kemal ou l’Orient en marche, Paris, Bossard, 1929, VIII+351 p., p. 128 et L’Esprit d’Orient, Paris G. Crès, 1930, XV+219 p., pp. 72 à 74, [cité par Anamur, H., 1997. « Préface » in Hommage à Hasan-Âli Yücel, La Traduction : Carrefour des Cultures et des Temps, Publication de l’Université Technique de Yıldız, İstanbul, pp. XII]. 3 Il s’agit du mémoire de maîtrise inédit, intitulé « Şehrezûri’nin el-Şeeceretü’l-İlahiyye isimli Eseri ve Türkçe tercümesi Semertü’ş-Şecere », élaboré par Kemal Sözen, sous la direction de Bekir Karlığa à l’Université de Marmara en 1989. 4 Ce texte figure parmi les textes annexes présentés par Giles Veinstein dans la suite de la Relation. 5 Texte annexe: voir « Vie quotidienne de l’ambassade turque en France à travers le mémoire de Le Dran » in Le Paradis des infidèles, pp. 228-233. Le mémoire fut rédigé en 1731, (Archives du Quai d’Orsay, Mémoires et Documents Turquie, t. X, doc.17, f. 166-284).
Synergies Turquie n° 5 - 2012 pp. 27-39
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La relation de voyage de Yirmisekiz Çelebi Mehmet Efendi et son impact
6 Ce texte figure parmi les textes annexes présentés par Giles Veinstein dans la suite de la Relation. 7 Texte annexe: voir « L’Ambassade à travers Le Nouveau Mercure », août 1721, pp. 165-169, in Le Paradis des infidèles, p. 204. 8 Ce texte figure parmi les textes annexes présentés par Giles Veinstein dans la suite de la Relation.